lundi 26 janvier 2009

L’O.I.N., la recherche et l’Université : le fait du Prince

Les annonces sur l’avenir du Plateau de Saclay et du Campus d’Orsay tombent en rafale :
- Nicolas Sarkozy donne le 12 septembre le coup d’envoi de l’aménagement du Plateau
- Christian Blanc, secrétaire d’état chargé de l’aménagement de la région capitale précise ensuite « il y a 99 chances sur 100, aujourd’hui, pour que (l’université) Paris XI vienne s’installer sur le Plateau »

Des réserves viennent immédiatement tempérer l’enthousiasme que ce plan pharaonique est censé susciter:
- Déménagement / Recomposition de l’Université Paris-Sud ? Après un travail long et approfondi mobilisant toutes les composantes de l’Université, des propositions de rénovation et mises aux normes dans le cadre du plan Campus (voir rapport P. Lagayette) ont été finalement adoptées par les instances universitaires. A peine avaient elles fi ni de siéger que Christian Blanc annonce le déménagement de l’Université …
- Implantation d’un Pôle Scientifique et Technologique de dimension mondiale (‘cluster’) sur le Plateau Serait-ce des moyens pour travailler correctement et dans des conditions décentes ? De quoi s’agit-il ? Avec qui ? Pour quoi faire exactement ? Qui pilote ? Pour qui ?… Toutes questions auxquelles il est impossible de répondre dans la mesure où aucune instance n’a été, ne serait ce même qu’informée, ne parlons pas de consultée ou associée …
Des travaux d’infrastructures mentionnés pour les transports, le logement, le désenclavement, …
Ces projets d’infrastructures donnent le sentiment d’être comme l’intendance, condamnées à suivre, de loin et après coup.

MAIS OÙ SONT LES FINANCEMENTS ET QUI VA PAYER ?

En fait, le gouvernement ne vient pas brusquement de sortir tout cela du chapeau. La désormais fameuse O.I.N. (opération d’intérêt national) a commencé à se mettre en place dès fin 2005 par une lettre de mission de Dominique de Villepin. Son projet : mettre en place un environnement porteur autour du Pôle de Compétitivité Mondial SYSTEM@TIC et favoriser, à partir de ce pôle, la convergence « NBIC » entre les Nanotechnologies, la Biologie, l’Informatique et les Communications. (Rapport du Préfet de Région). On annonçait alors jusqu’à 100 000 logements, autant d’emplois, 300 000 nouveaux habitants, des autoroutes et des routes, des transports en commun, des raccordements au TGV et aux aéroports, …
Ensuite, s’est greffé sur l’opération l’autre Pôle de Compétitivité Mondial MEDICEN-Santé puis des annonces d’implantation du Centre Recherche EDF, de l’ENS Cachan, de l’Agro-Paris, …

Outre les Pôles de Compétitivité, le gouvernement mettait déjà en place les composantes d’une machine de guerre destinée à prendre la main sur les orientations et le fonctionnement de la Recherche et de l’Université.
- Au niveau national, création de l’A.N.R. contrôlée de près par Bercy, et de l’A.E.R.E.S. qui tient ses attributions du prince.
- Démantèlement des organismes centraux comme CNRS, INSERM, réorientés en ‘’agences de moyens’’ privées des capacités de définir des politiques propres articulant cohérence nationale et développement coordonné des territoires.
- Au niveau local, mise en place des Réseaux Thématiques de Recherche Avancée (RTRA) placés sous la tutelle de fondations de droit privé, qui par delà des aspects de coopération et de mutualisation, se révèlent être, comme l’A.N.R., des outils de focalisation des financements contribuant ainsi à dessaisir les organismes nationaux.
- Le faux nez d’une soit - disant autonomie des Universités qui ouvre très largement la voie à l’arbitraire et pousse à la concurrence dans la chasse aux financements.

On vient de voir d’ailleurs ce que vaut cette fameuse autonomie avec le mépris abyssal manifesté envers une Université qui n’est informée de son déménagement que par voie de presse ! Accompagnant tout cela : Un déficit démocratique, aucune consultation : chercheurs, enseignants et étudiants, laboratoires et unités, formation et enseignement, traités en simple marchandise qu’on utilise et déplace au gré des fluctuations de la conjoncture. Qui doit en bénéficier ? Comme le disait sans fard le Préfet de Région : les Pôles de Compétitivité dont les participants Thalès, EADS, Dassault, Renault, PSA, Aventis, … sont ceux qui ont liquidé leurs secteurs de recherche et comptent sur les structures et les financements publics pour se refaire une santé à bon compte face à leurs concurrents. La crise actuelle montre que nous ne pouvons pas leur faire confiance : en place de développer l’activité et l’emploi ils ont joué au casino boursier avec les conséquences déjà avérées et celles gravissimes qui ne manqueront malheureusement pas d’advenir.

Quelques remarques :
- rien ne serait pire que de céder au « tout est bouclé on ne peut plus rien faire ». Les personnels et les étudiants sont le cœur vivant du dispositif. Sans eux tous ces beaux projets ne conduiront qu’à un ‘cluster’ fantôme. C’est à partir de là qu’il nous appartient de réclamer d’être informés, de revendiquer d’être consultés, d’imposer d’être associés ! Face à un calendrier délirant (passage en Conseil des Ministres en janvier, au Parlement au printemps) il faut imposer le temps de la concertation. et puis rappelons que l’objectif premier est une recherche d’excellence et un enseignement de qualité, ouvert au plus grand nombre et en prise avec les défi s de notre siècle. Avant tout ce sont les moyens qui manquent. Au lieu de jongler avec des euros virtuels par milliards, qu’on alloue d’abord des moyens pour faire fonctionner ce qui existe, comme le Synchrotron SOLEIL par exemple (au même titre que le RER-B par exemple). Il convient de réagir pour ne pas voir sacrifié l’avenir de toute une génération.
- S’ils veulent bâtir une « économie de la connaissance », encore convient-il d’abord de produire cette connaissance ! Alors Recherche et Enseignement Supérieur doivent être les pivots d’une politique publique toute entière tendue vers le développement et l’emploi. Nous n’accordons aucune confiance à ceux, financiers, dirigeants des grands groupes, dirigeants politiques qui ont déjà étranglé l’Université et la Recherche. Ceux-là même qui conduisent le monde à la catastrophe dont nous subissons les conséquences actuellement : nous et pas eux !

ALORS, RIEN N’EST JOUE À CONDITION POUR PORTER D’AUTRES VALEURS !

QUI DECIDE ET QUI PAIE ?

Selon Christian Blanc, le coût global de ce projet se situe entre 2,5 et 3 milliards d’euros. Mais pas une seule ligne ne répond à la question du financement. Or qui dit nouveaux habitants dit logements, écoles, voiries, crèches, etc. Qui va payer l’addition ?
. Les collectivités locales ? C’est encore un effort financier supplémentaire qui leur serait demandé alors que déjà l’Etat se désengage financièrement de toutes ses obligations en matière de services publics.
. Le privé ? La panacée annoncée des Partenariat Public Privé (PPP) est un vaste chantier de réorganisation du financement public en France : le privé assure la construction du bâtiment et sa maintenance, le public paye un loyer pendant 20 à 30 ans … loyer rentable puisque calculé par ce même privé. A l’arrivée en fi n de contrat, le public devient propriétaire d’un bien vétuste.

512 K OU HAUT DEBIT POUR TOUS ?

La réalisation d’un réseau internet performant à très haut débit est prévue pour servir les futurs grands centres de recherche et les entreprises de pointe du plateau. Rien n’est proposé en revanche pour les habitants et les entreprises des vallées.

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Aménagement du plateau de Saclay

Les citoyens et les acteurs du territoire ont leur mot à dire

Sans concertation ni débat public, le secrétaire d’Etat à la « Région Capitale », Christian Blanc, a présenté au chef de l’Etat le 6 novembre son projet d’aménagement du plateau de Saclay. Le but affiché : créer en 20 ans un pôle technologique et scientifique de rang mondial. Ce projet s’étend sur les départements de l’Essonne et des Yvelines. Il concerne 27 communes dont Palaiseau, Saclay, Satory, le parc d’activité de Courtaboeuf et un secteur de Massy.

UN IMPACT IMPORTANT SUR NOTRE TERRITOIRE

Le projet vise à concentrer des ressources scientifiques et industrielles sur un même territoire. Il s’accompagne d’un régime d’Opération d’Intérêt National (O.I.N.) qui confère à l’Etat des pouvoirs spéciaux : il contrôle les autorisations de construire et ses choix d’aménagement s’imposent au droit des sols des collectivités locales. L’OIN prévoit par exemple de ne préserver que 1 800 ha de terres agricoles et d’espaces naturels. Les 2 300 hectares « d’activités agricoles utiles» inscrits au projet de SDRIF (schéma directeur régional d’Ile de France voté le 26 septembre 2008) voulus par les associations locales et votés par les élu-e-s de la CAPS (communauté d’agglomération du plateau de Saclay) sont bradés. Et malgré cette consommation d’espace, l’Etat ne parle que de « développer une offre compétitive en matière de logements pour les emplois liés au cluster » : 25000 chercheurs, ingénieurs et étudiants (sur un total de 35000 nouveaux habitants). Pour créer un « ghetto » scientifique ? Rien de concret afin de répondre au besoin de logements pour tous. Côté transport, au milieu des annonces, le projet d’un métro souterrain automatique depuis l’aéroport d’Orly à Versailles via le plateau de Saclay, a de quoi inquiéter : une dépense de 80 millions d’euros par kilomètre avec un itinéraire passant sous les étangs de Saclay…

L’EMPLOI ET LA RECHERCHE AU SERVICE DE LA SEULE ECONOMIE DE MARCHE

Le mot magique du projet est « cluster » : mettre en réseau sur un seul site des entreprises, des centres de formation et des laboratoires de recherche publics et privés afi n de développer des projets au fort potentiel d’innovation. Le projet de C. Blanc nous promet déjà « croissance, emploi, compétitivité, développement durable, santé, qualité de vie, lutte contre la pauvreté » …la réalité est toute autre.

QUI DECIDE ET QUI PAIE ?

Selon Christian Blanc, le coût global de ce projet se situe entre 2,5 et 3 milliards d’euros. Mais pas une seule ligne ne répond à la question du financement. Or qui dit nouveaux habitants dit logements, écoles, voiries, crèches, etc. Qui va payer l’addition ?
Les collectivités locales ? C’est encore un effort financier supplémentaire qui leur serait demandé alors que déjà l’Etat se désengage financièrement de toutes ses obligations en matière de services publics.
Le privé ? La panacée annoncée des Partenariat Public Privé (PPP) est un vaste chantier de réorganisation du financement public en France : le privé assure la construction du bâtiment et sa maintenance, le public paye un loyer pendant 20 à 30 ans … loyer rentable puisque calculé par ce même privé. A l’arrivée en fi n de contrat, le public devient propriétaire d’un bien vétuste.

La logique n’est pas du tout celle de la coopération pour le progrès de l’emploi, des qualifications et des salaires. C’est celle de la mise en concurrence des territoires entre eux : les mobiliser pour servir les exigences de compétitivité des grands groupes économiques et leurs objectifs de rentabilité financière. Le projet parle d’un apport de 40.000 emplois d’ici 2020, sans garantie aucune.

Il ne décrit pas les transferts d’entreprises et de centres de recherche sur le plateau : rien ne garantit que l’emploi dans la recherche industrielle soit renforcé. De trop nombreux exemples montrent que les grands groupes privés se servent de ces transferts pour réduire l’emploi Recherche et Développement (Thalès, Danone). De plus, la recherche publique est mise au service de ces mêmes groupes. Le plan de C. Blanc parle d’excellence des sciences pour préciser aussitôt qu’elle devra être « utilisée pour nourrir des thématiques plus orientées vers le marché ». Cette stratégie de concentration d’établissements, au détriment d’autres territoires, aggravera encore les déséquilibres existants au niveau de la région Ile de France.

Une gouvernance démocratique pour élaborer et décider
  • Un débat public sur l’articulation entre le projet du Plateau et les réformes en cours de l’enseignement supérieur et de la recherche
  • Une concertation organisée avec les instances des établissements d’enseignement supérieur et des grands organismes publics de recherche et un diagnostic sur les bâtiments de la fac d’Orsay
  • La structure de pilotage de l’OIN ouverte aux acteurs sociaux de terrain : représentants des comités d’entreprise, syndicats de salariés, mouvement associatif
  • Une concertation sérieuse avec tous les élus des collectivités territoriales concernées
Des moyens pour répondre aux besoins de la population
  • Du renouvellement urbain dans les vallées avant toute diminution du poumon que représente le plateau de Saclay
  • L’engagement financier de l’Etat d’aider les collectivités à atteindre l’objectif de 30% de logements sociaux
  • Un réseau public de transport rénové tirant parti des innovations technologiques avec:
    - L’amélioration significative des lignes B et C du RER
    - La réorganisation du réseau de bus
    - Le développement de liaisons douces de qualité
    - La promotion de l’emploi durable
  • Le développement de l’emploi scientifique et technique pérenne au niveau des organismes publics qui sont les moteurs pour la recherche et l’enseignement supérieur en France tels le CNRS, le CEA, l’INRA et l’université Paris XI
  • Une commission de contrôle des fonds publics versés aux entreprises, qui mesure leur efficacité pour l’emploi et la formation
  • Une fiscalité incitative pour la recherche privée créatrice d’emploi.
  • Aider les PME avec la création d’un Fonds régional pour l’emploi et la formation (FREF) pour prendre en charge une partie des intérêts versés aux banques sur des crédits à long terme pour les investissements productifs.

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